Posté à 5h00
                Jean-Thomas Léveillé La Presse             

Les dirigeants des Chantiers Chibougamau ont été stupéfaits lorsque leur usine de pâte à papier de Lebel-sur-Quévillon a été accusée de polluer au-delà des normes québécoises. «Nous n’avons aucune autorisation pour rejeter des polluants au-delà des normes», a déclaré à La Presse Frédéric Verreault, directeur général du développement corporatif de l’entreprise. ” [Dire le contraire]c’est faux, c’est sans fondement », a-t-il assuré. Les Chantiers Chibougamau ont acheté l’usine Nordic Kraft de Domtar en 2017 et l’ont rouverte en 2020, après 15 ans d’inactivité, afin de récupérer les déchets de leur activité principale, la fabrication de matériaux de construction en bois. L’autorisation ministérielle de l’établissement (auparavant appelée certificat de décontamination), qui a suivi la transaction, précise « noir sur blanc » que les normes actuelles et futures doivent être respectées, souligne M. Verreault. “Le libellé des normes réglementaires applicables aux points d’élimination prévaut sur le libellé des [la présente] certificat d’hygiène », peut-on lire dans le document que l’entreprise a fait parvenir à La Presse. Frédéric Verreault donne l’exemple des émissions de poussières de bois dont la limite légale a été ramenée de 450 à 100 microgrammes par mètre cube entre la délivrance de l’autorisation ministérielle et le redémarrage de l’usine. Nous n’avions aucun droit acquis. au jour 1, nous avons dû respecter l’objectif réduit. Frédéric Verreault, directeur exécutif du développement corporatif des Chantiers Chibougamau L’affirmation plus tôt cette semaine par le ministre de l’Environnement et du Changement climatique Benoît Charette selon laquelle les permis ministériels permettent une pollution au-delà des normes a semé la confusion, déplore M. Verreault. “Le gouvernement sait très bien que notre certificat n’équivaut pas à un droit à polluer”, dit-il. Nous n’avons aucune raison de douter de la sévérité du ministre, mais il a clairement reçu de mauvaises informations. » Frédéric Verreault regrette que certains médias aient prétendu à tort que chacune des 89 entreprises détentrices d’une autorisation ministérielle a dérogé à la loi. “Nous avons parlé à deux journalistes [qui ont publié des reportages en ce sens]ils ont l’information et ont choisi de ne pas en parler », a-t-il déploré. Ces rapports ont suscité un déluge de questions pour l’entreprise, y compris de la part de ses propres employés frustrés, mais aussi des membres de la communauté, a déclaré M. Verreault. “On nous jette sous le bus avec la ministre Charette”, a-t-il dit. Il est temps de déplacer le bus, car nous ne méritons pas d’être là, avec l’énergie donnée pour respecter les lois environnementales. »

Mea culpa du ministre

L’affirmation de M. Charette “était incomplète”, reconnaît son attachée de presse, Rosalie Tremblay-Cloutier. PHOTO DE FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE Benoit Charette, ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques Les 89 entreprises qui disposent actuellement d’une autorisation ministérielle “ne bénéficient pas systématiquement du droit de déroger aux lois et réglementations environnementales existantes”, a-t-il précisé. En effet, la grande majorité de ces entreprises sont tenues de se conformer aux normes québécoises applicables à leurs rejets. Rosalie Tremblay-Cloutier, attachée de presse du ministre Benoit Charette Cependant, des dérogations ont été accordées « pour des raisons historiques », dont la plus notoire concerne la Fonderie Horne à Rouyn-Noranda.

Manque de transparence

La confusion sur les autorisations ministérielles montre qu’il y a « un problème avec l’information à laquelle nous avons accès », explique l’avocate Anne-Sophie Doré, du Centre québécois du droit de l’environnement. “C’est le problème : nous ne savons pas [ce que permettent ces documents] “, elle dit. La réforme de la loi sur la qualité de l’environnement (LQE), adoptée en 2017, prévoyait que les autorisations ministérielles seraient publiques et accessibles depuis un registre électronique, qui n’a pas encore été créé. « Le futur registre public, tel que prévu par la réforme de la LQE, entrera en vigueur lorsque le gouvernement fixera la date d’entrée en vigueur de ce nouveau registre public », avait indiqué à La Presse, plus tôt cet été, le porte-parole du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Sophie Gauthier. Le cabinet de la ministre Charette s’est engagé à rendre publiques les 89 autorisations ministérielles en vigueur « d’ici la semaine prochaine ».

Qu’est-ce qu’une autorisation ministérielle ?

Les permis ministériels (anciennement appelés certificats de décontamination) régissent les rejets de polluants provenant d’installations industrielles. Ils peuvent dans certains cas permettre de dépasser les normes applicables. Le gouvernement du Québec a progressivement imposé ces certificats à deux secteurs d’activité : d’abord à l’industrie des pâtes et papiers en 1993 (les premiers certificats ont été délivrés en 2000), puis à l’industrie minérale et à la première transformation des métaux en 2002. Actuellement, 89 usines industrielles rejettent polluants dans l’environnement disposent d’une autorisation ministérielle, mais le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre le changement climatique prévoit que leur nombre pourrait à terme atteindre 250.

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			1972 Année d’entrée en vigueur de la Loi sur la qualité de l’environnement du Québec 			 			Source : Gouvernement du Québec 		  


		Source : Gouvernement du Québec